L a prosodie est un aspect déterminant du langage parlé qui permet de véhiculer un message linguistique et paralinguis-tique et que nous pouvons définir comme un système grammatical complexe (Beckman, 1996) dont les sous-composantes sont l'intonation, le phrasé et l'accentuation (intonation, phrasing , prominence). D'un point de vue strictement phonétique, il s'agit principalement des modulations mélodiques et rythmiques produites dans un énoncé qui servent à véhiculer du sens pragma-tique (comme le focus de phrase) ou bien à marquer la frontière des constituants syntaxiques. En effet, afin de saisir pleinement le sens ou la structure linguistique d'un énoncé, les informations lexicales, syntaxiques et sémantiques ne suffisent pas, et les modulations prosodiques doivent être prises en compte. Par exemple, la même phrase « Aujourd'hui il fait vraiment beau » peut véhicu-ler soit un sens littéral, si elle est prononcée avec une intonation assertive neutre, ou bien signifier son contraire si elle est pronon-cée avec une prosodie ironique (D'Imperio, Champagne-Lavau, Loevenbruck, et Fouillaud, 2013 ; Loevenbruck, Jannet, D'Impe-rio, Spini & Champagne-Lavau, 2013). La prosodie joue aussi un rôle dans la désambigüisation syntaxique, si on prend l'exemple « La vieille ferme la porte », qui peut être prononcé soit comme « La vieille ferme la porte » ou bien « La vieille ferme la porte » (où la rupture prosodique est marquée par la barre verticale), qui diffèrent par la fonction de l'homophone « ferme » qui revêt un rôle verbal dans la première phrase vs celui d'un adjectif dans la deuxième. Il s'agit aussi des premiers aspects de la parole acquis par l'enfant, et ce à partir du stade prénatal (de Boysson-Bardies, 1996), qui lui permettront d'accéder au lexique (Gerken, 1996 ; Gerken, et Aslin, 2005 ; Jusczyk, Cutler, et Redanz, 1993 ; Jusc-zyk, et Kemler Nelson, 1996) ainsi qu'à d'autres structures lin-guistiques, telles que les constituants syntaxiques de haut niveau. Parmi les sous-systèmes prosodiques, un aspect qui a retenu l'attention de nombreux chercheurs est l'intonation, ou les variations mélodiques au cours de l'énoncé qui peuvent être utilisées pour apporter une valeur pragmatique contrastive (Beyssade, Delais-Roussarie, Marandin, et Rialland, 2004 ; Ladd, 1996/ 2008 ; Portes et Reyle, 2014). Dans le langage adulte, des patrons intonatifs contrastifs, tels que des accents mélodiques catégori-quement différents (qui diffèrent par exemple en alignement tonal, c'est-à-dire la position temporelle du pic mélodique à l'intérieur d'une syllabe accentuée, voir D'Imperio 2011 pour une revue), peuvent en effet déterminer à eux seuls la valeur pragmatique d'un énoncé telle que, par exemple, le contraste entre une question et une assertion, comme dans (1) ; ou signaler la portée du focus informationnel (large ou étroit) ou un contraste dans le discours, comme dans (2) ; ou bien désambigüiser un référent dans le discours (Ito et Speer, 2008), ce qui est exemplifié en (3). Plus spécifiquement, une courbe mélodique montante (voir 1b) est uti